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Accident du travail et maladie professionnelle: Gontrand CHERRIER, Avocat spécialiste au Barreau de ROUEN
29 février 2008

Synthèse sur l’inopposabilité de la décision attributive de rente à l’employeur

Synthèse sur l’inopposabilité de la décision attributive de rente à l’employeur

I.       la détermination du montant du taux de rente d’incapacité permanente

En vertu des dispositions des articles L434-1 et suivant du code de la sécurité sociale, la CPAM doit tenir compte, pour déterminer le montant du taux de rente d’incapacité permanente :

- de l’état général du salarié, son âge, ses facultés physiques et mentales ;

- des aptitudes et de la qualification professionnelle du salarié ;

- du barème forfaitaire fixé par décret.

II.   Le recours de l’employeur

Ø    Le Droit de recours de l’employeur

La caisse est tenue de notifier sa décision à l’employeur.

à    Article R434-35 al 3 : « la décision motivée est immédiatement notifiée par la Caisse à la victime ou à ses ayants  droit par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le double de cette décision est envoyé à la Caisse régionale et à l’employeur au service duquel est survenu l’accident. »

L’employeur qui reçoit un double de la décision bénéficie d’un recours effectif et peut faire valoir ses droits dans le cadre d’un débat contradictoire devant les juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale. Il a en effet le droit de discuter cette décision, de vérifier que la caisse a bien respecté les dispositions légales.

Ø     Sur la prescription

Conformément aux dispositions de l'article R.143-21 du Code de la Sécurité sociale, les taux accidents du travail / maladie professionnelle deviennent définitifs à l'expiration du délai de deux mois suivant la notification à l'employeur, à défaut de contestation de sa part.

Par conséquent, le recours de l’employeur doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification.

Ø    Sur la compétence d’attribution

La cour de Cassation, dans son arrêt du 8 novembre 2006, réaffirme très clairement la compétence des juridictions du Contentieux Technique de la Sécurité Sociale ( TCI en première instance et CNITAAT en appel ) pour juger tant des décisions prises par les CPAM fixant le taux de l’IPP que du respect de la procédure régissant les rapports entre les CPAM et les employeurs.

Cet arrêt s’inscrit dans la continuité des arrêts NEWELL du 15 novembre 2001 et TREDI du 26 septembre 2002, procédant à une étendue de compétence des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale qui doivent, quand bien même aucune contestation médicale relative au taux d’IPP n’est soulevée par l’employeur, vérifier l’application des dispositions réglementaires relatives à la procédure de fixation du taux d’IPP et notamment des obligations d’information imposées aux caisses primaires à l’égard des employeurs ( dont la motivation des notifications d’attribution de rente).

III. Sur les moyens d’inopposabilité

Le respect du contradictoire étant au centre de la procédure, l’employeur est en droit de demander à la Caisse qu’elle lui communique les pièces médicales sur lesquelles elle s’est fondée pour déterminer le montant du taux de rente.

L’examen portera principalement sur les hypothèses où la Caisse refuse de communiquer les pièces médicales privant l’employeur de son droit de se défendre.

.

Ø     Sur le non respect de l’article R143-8 alinéa 2 du CSS

La CPAM méconnaît les dispositions de l’article R 143-8 alinéa 2 du code de sécurité sociale, lequel dispose que :

« Dans ce même délai (celui de dix jours suivant la réception de la déclaration de recours devant le tribunal du contentieux de l’incapacité), la caisse est tenue de transmettre au secrétariat les documents médicaux concernant l’affaire et d’en adresser copie au requérant ou, le cas échéant, au médecin qu’il a désigné. »

L’avocat ne peut pas recevoir directement les pièces médicales de son client. (circ. CANCAVA n°03/14 , 28 oct 2003).

Ø     Sur le non respect des règles d’administration de la preuve

L’article 1315 du code civil, applicable en toute matière, fait notamment peser sur celui qui réclame l’exécution d’une obligation, la charge de la preuve.

En application de cette disposition légale, celui qui ne justifie pas du bien fondé de son droit à imposer sa décision à l’autre, succombe en ce droit.

Dès lors que la CPAM impose à l’employeur une obligation de prise en charge des conséquences financières de sa décision d’attribution de rente, elle est tenue de lui communiquer les pièces sur lesquelles elle a précisément fondé sa décision.

Défaillante dans l’administration de cette preuve, la CPAM doit, consécutivement et en application des articles 1315 et suivant du code civil, en supporter les conséquences, en succombant dans son droit à imposer à l’employeur, les conséquences financières de sa décision d’attribution de rente.

Ø     Non respect des dispositions du code de procédure civile en matière de respect des droits de la défense

« A l’appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d’alléguer les faits propres à les fonder. » (article 6)

« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. » (article 9)

Les dispositions de l’article 132 alinéas 1 du code de procédure civile font encore obligation à « la partie qui fait état d’une pièce (…) à la communiquer à toute autre partie à l’instance ».

Ø     Non respect de l’article 6-1 de la convention européenne des droits de l’homme qui pose le principe d’égalité des armes.

Ø     Non respect de l’article R434-35 alinéa 3

La position de refus de communication de la CPAM qui serait en outre fondée sur le secret médical se heurte aux dispositions de l’article R434-35 alinéa 3  du code de la sécurité sociale, qui font obligation à la caisse de communiquer à l’employeur, la décision de notification d’attribution de rente MOTIVEE.

Ø     Le motif de secret médical doit être écarté

Tout d’abord, le secret médical n’est pas opposable entre médecins, et ce même en l’absence d’accord explicite de l’assuré.

Le motif de secret médical avancé par la caisse pour refuser la communication du dossier médical a déjà été écarté par des juridictions françaises.

à    TASS LAVAL 15 novembre 1994, JCP Ed E 1995 n°7

Cette jurisprudence a été confirmée par la Cour Nationale de la Tarification et de l’Assurance des Accidents du Travail par un arrêt rendu le 20 décembre 2006.

(CNITAAT, 20 décembre 2006, n° répertoire 0502953)

à    Arrêt de la cour de cassation du 22 novembre 2007

En l’absence de toute justification qui ait pu être contradictoirement débattue, la décision de la caisse est inopposable à l’employeur.

Conséquences de l’inopposabilité :

L’employeur n’a pas à supporter les conséquences financières de sa décision d’attribution de rente.

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Commentaires
T
La Caisse primaire d'assurance maladie n'a pas apposé sa signature dans la case du procès-verbal d'enquête légale après un décès reconnu comme un accident du travail, l'enquêteur (assermenté) a mis sa signature, est-ce normal ?<br /> <br /> Merci par avance.
J
Bonjour,<br /> <br /> J'ai une petite question d'odre juridique. Je profite donc de vos compétences en la matière...<br /> <br /> Est-ce qu'une décision rendue par la CPAM par erreur mais favorable au salarié (arrêt de travail) est opposable à l'employeur?<br /> <br /> Il me semble qu'il ya une sorte de droits acquis au profit du salarié....<br /> <br /> Merci d'avance
B
Bonjour,<br /> <br /> Le délai est-il de deux ans dans le cadre de l'action en répétition de l'indu? (article L 243-6 CSS)<br /> En outre, la notification doit être adressée en recommandé avec accusé réception pour faire partir le délai de deux mois.<br /> Merci de votre réponse!<br /> PS : je suis un simple particulier qui m'intéresse au droit de la Sécurité Sociale.
S
Juriste spécialiste en matière de sécurité sociale, je tiens à apporter une rectification à la prose précitée :<br /> <br /> le délai de recours de l'employeur suite à l'envoi du double de la notification d'attribution de rente n'est pas de deux mois pour la simple et bonne raison que l'article R.434-35 du CSS ne prévoit aucune notification à l'employeur.<br /> <br /> Il n'est en effet que de lire le texte pour comprendre que l'employeur n'est destinataire que du double de la décision pour information, ce qui ne l'enferme pas dans le délai dit classique de contestation de deux mois existant en matière de sécurité sociale.<br /> <br /> Ceci est confirmé par une jurisprudence abondante et constante que je vous laisse rechercher.<br /> <br /> Il faut donc bien lire les textes avant d'affirmer telle ou telle chose.<br /> <br /> Je vous laisse donc deviner quel est le délai dont dispose réellement l'employeur car je ne souhaite pas donner à ces derniers l'occasion d'avoir un conseil gratuit !<br /> <br /> Etant précisé qu'il ne s'agit quant même pas du délai de droit commun.<br /> <br /> seb
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  • Gontrand CHERRIER anime un blog sur l'actualité du droit de la Sécurité Sociale. Il est titulaire du certificat de spécialisation en droit de la Sécurité Sociale et de la Protection Sociale
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